Il est de plus en plus évoqué, sans beaucoup d’autres précisions, que l’on pourrait recourir à l’utilisation des données GSM pour aider à lutter contre la pandémie ou pour préparer le déconfinement.
Le député PS, Khalil Aouasti, a dès lors interrogé cet après-midi en séance plénière de la Chambre le Ministre De Backer afin d’obtenir plus de précisions sur le recours à ces métadonnées générées par les téléphones mobiles, comme par exemple, le lieu où le téléphone se trouve, ceux qui sont à proximité de ce téléphone, l’identité des personnes contactées, la durée, le moment, le nombre d’échanges, etc.
S’il est évident que pour lutter contre la pandémie, on doit mobiliser les avancées technologiques et l’intelligence artificielle, il est tout aussi évident que ces réponses doivent s’inscrire dans notre cadre démocratique, qu’il faut les accompagner de solides balises destinées à concilier l’exigence de l’intérêt public et le respect absolu des libertés individuelles, en ce compris les règles de respect de la vie privée. Et seule la transparence peut amener ces garanties.
C’est sur ce défaut de transparence que le député Aouasti a interrogé le gouvernement, et sur l’opacité des choix qui pourraient être opérés. De quoi s’agira-t-il ?
- S’agit-il de collecte de données anonymes ou bien d’un tracking des informations individualisées ?
- S’agit-il de développer une application comme dans certains Etats qui permettrait de savoir qui a été en contact avec une personne contaminée ou d’utilisation des données pour mieux appréhender le respect du confinement ?
- S’agit-il d’une utilisation de données avec autorisation ou non ?
- Ces données servent-elles à préparer le déconfinement ou à faire respecter le confinement ?
Le Ministre a affirmé marquer sa préoccupation pour le respect de la vie privée et des libertés individuelles mais n’a pas apporté de réponses permettant de lever l’opacité et d’être rassurés.
Pour le député PS Khalil Aouasti, « il faut veiller à ce que des restrictions aux droits fondamentaux ne soient jamais autorisées pour sauvegarder certains intérêts économiques, ni qu’une crise sanitaire ne soit un prétexte à des décisions liberticides. Permettre le tracking généralisé de la population revient à ouvrir la boîte de pandore avec deux craintes majeures : d’une part, décrire une donnée de localisation comme anonyme est une allégation totalement fausse et, d’autre part, un signal téléphonique permet de de déterminer les mouvements de chacun et faire une intrusion inadmissible dans son intimité. Il serait donc aisé, en l’absence de balises claires et de contrôle strict, de traverser des frontières dangereuses. Aujourd’hui, pourtant, il existe un défaut de transparence du gouvernement sur ce qu’il envisage en matière d’utilisation des données. Les circonstances ne sauraient justifier toutes les transgressions et l'utilisation des données aujourd'hui, et surtout demain, pourrait être dangereuse, et nous devons la cadrer. C’est pour cela que les choix qui seront faits doivent absolument permettre un contrôle extérieur. Les protocoles et les codes sources doivent être ouverts et vérifiables ».
Pour le PS, la priorité doit être donnée aux urgences sanitaires et y apporter des réponses concrètes comme la mise à disposition de masques de protection et le testing massif de la population. Ce dépistage à grande échelle est recommandé par l’OMS et souhaité par de nombreux acteurs de terrain. Il semble faire ses preuves dans d’autres pays et il sera sans doute une des clés pour assouplir les mesures de confinement généralisé.
Une crise sanitaire ne peut servir d’alibi à des décisions liberticides qui auraient pour effet d’abîmer de manière irrémédiable notre démocratie. Le testing, quant à lui, constitue une solution efficace et optimale qui ne porte pas atteinte aux droits fondamentaux des citoyens.