Question de Nawal Ben Hamou à Zuhal Demir, secrétaire d'Etat à la Lutte contre la pauvreté, sur la prostitution des étudiants précarisés

Monsieur le président, ma question est adressée à Mme la secrétaire d'État.

 

Madame la secrétaire d'État, avant, quand on était aux études, les week-ends, on tenait la caisse à l'épicerie du coin ou on distribuait les journaux. Aujourd'hui, on se prostitue.

 

J'espère que, tout comme moi, vous avez été choquée par la publicité faite par ce site de rencontres. Vous le savez sûrement, il s'agit de grands panneaux publicitaires qui incitent les jeunes étudiantes à s'inscrire sur ce site internet pour améliorer leur style de vie. Ce site, qui se présente comme un site de rencontres classique, n'est rien d'autre que de la prostitution déguisée.

 

Loin de moi l'idée de faire de la publicité pour ce genre de sites, ni de juger les jeunes filles qui ont décidé de s'y inscrire. Ce qui m'amène aujourd'hui à prendre la parole et à vous questionner, ce sont les raisons pour lesquelles ces étudiantes vendent leurs charmes. Lorsqu'on leur pose la question, elles vous répondent clairement qu'elles n'arrivent plus à payer leurs études, qu'elles ont de plus en plus de mal à assumer leurs factures, leur logement, leur minerval; et il faut manger aussi, et se vêtir. Le fond du problème, et ce qui nous préoccupe, c'est la précarité croissante dans laquelle vivent nos étudiants.

 

Sans oublier que ce style de vie entraîne aussi une grande insécurité. Ces femmes peuvent se retrouver dans des situations potentiellement dangereuses. Nous ne pouvons pas fermer les yeux et faire comme si de rien n'était. En tant que jeune femme, je me sens plus que concernée. Quel avenir et quelle dignité offrez-vous à ces jeunes femmes?

 

Plusieurs ministres de la Fédération Wallonie-Bruxelles ont pris leurs responsabilités en se constituant parties civiles au pénal pour incitation à la débauche et à la prostitution. Des bourgmestres ont fait interdire ce genre de panneaux publicitaires sur leur territoire. Par contre, de votre part, je n'ai vu aucune réaction. Rien du tout. Vous êtes secrétaire d'État à l'Égalité des chances, mais aussi à la Lutte contre la pauvreté. Comme je l'ai dit, c'est le vrai problème ici. Vous avez un rôle essentiel à jouer. Pourtant, depuis votre prise de fonctions, votre action dans ces domaines semble inexistante.

 

Madame la secrétaire d'État, je n'ai qu'une question à vous poser: allez-vous également prendre vos responsabilités dans ce dossier? 

Réponse de Zuhal Demir

L'instigateur de cette campagne a été convoqué mais ne s'est pas présenté hier au rendez-vous.

 

Évitons de lui faire davantage de publicité. Mme Van Hoof a même insinué que mon président de parti trouverait la débauche normale parce que la ministre flamande Mme Homans et moi-même n'avons pas voulu participer à la campagne de diffamation contre ce site de rencontres.

 

Je ne souhaite toujours pas le faire. On ne peut imaginer meilleure publicité pour ce site que la campagne de diffamation de ces derniers jours! Des sites comme celui-ci, des annonces qui proposent du sexe contre paiement, des sites de rencontres douteux ... il y a bien longtemps que tout cela existe.

 

Chaque jour, on trouve quantité d'annonces érotiques dans la presse écrite.  Ces publicités s'étalent pourtant quotidiennement dans les journaux, sans pour autant susciter une levée de bouclier politique collective.

 

Ce qui fait la différence, c'est que le site de rencontres en question s'adresse à de jeunes étudiantes. Je présume que celles-ci sont tout de même mieux armées et plus capables de se défendre que les pauvres jeunes femmes étrangères qui se cachent derrière les petites annonces et qui sont exposées dans les vitrines.

 

Mme Debaets, secrétaire d'État de la Région de Bruxelles-Capitale, souhaite interdire les affiches pour protéger les étudiantes, mais en revanche, pour les prostituées plus ordinaires, on plaide pour la construction d'un mégabordel. Voilà un bel exemple d'indignation sélective!

 

Du reste, je m'inquiète nettement plus du sort des étudiantes de l'enseignement secondaire prises dans les griffes de loverboys. C'est pourquoi le ministre Geens et moi-même dégageons des moyens financiers pour des organisations telles que Payoke.

 

Cette campagne publicitaire est de mauvais goût! La seule question qui se pose est celle de savoir ce qui est légalement autorisé. Le ministre Geens y a répondu et ce point est aussi à l’examen.

Réplique de Nawal Ben Hamou

Madame la secrétaire d'État, vos réponses sont indignes d'une secrétaire d'État à l'Égalité des Chances et à la Lutte contre la Pauvreté!

 

Comme je l'ai dit – mais peut-être n'avez-vous pas écouté? –, il ne s'agit pas de faire de la publicité pour ce genre d'entreprise. Le fond du problème, c'est la précarité de ces jeunes. Visiblement, vous n'en avez que faire et vous avez décidé de fermer les yeux!