Question de Sébastian Pirlot à Steven Vandeput, ministre de la Défense, sur les tensions entre la Turquie et la Russie

Monsieur le ministre, depuis les attentats de Paris, l'objectif de la communauté internationale est de former la coalition la plus large possible contre Daesh pour préparer également l'après-Assad en Syrie. Le président François Hollande s'est lancé dans un marathon diplomatique, difficile vu la complexité de la situation, pour mettre en place une telle coalition, dont l'ennemi commun est le terrorisme.

 

La tâche est difficile. Elle l'est encore plus depuis les récentes tensions survenues entre la Turquie, membre de l'OTAN, et la Russie. En effet, mardi, un chasseur bombardier russe a été abattu par un missile air-air tiré au départ de la Turquie. Ces tensions sont autant de dangers pour l'unité et la recherche d'une solution globale, sous mandat de l'ONU, dans ce qu'on peut appeler le bourbier syrien. Je me permettrai de vous poser quelques questions.

 

Premièrement, durant la réunion extraordinaire de l'OTAN, quelle position notre pays a-t-il défendue? Quelle attitude avez-vous prise face à votre homologue turc, mais aussi face aux autorités russes?

 

Deuxièmement, avez-vous eu des informations un peu plus précises quant aux messages contradictoires reçus tant de la Russie que de la Turquie au sujet de cet incident aérien? Quel suivi l'OTAN compte-t-il y donner?

 

Quid de l'attitude ambiguë de la Russie vis-à-vis des frappes militaires en Syrie, dont nous savons qu'elles touchent aussi bien les djihadistes que l'opposition à Bachar el-Assad? Quid de l'attitude ambiguë de la Turquie vis-à-vis de l'État islamique? Nous savons que certaines frontières sont à tout le moins poreuses et que, de temps à autre, des bombardements visent les Kurdes.

 

Plus globalement, où en est-on dans le projet de mise en place d'une coalition internationale? Notre objectif est-il de jouer un rôle actif dans le processus politique de cette mise en place d'une large coalition?

 

Enfin, pouvez-vous faire le point sur la mission de notre frégate Léopold I, qui au départ était purement défensive? Allons-nous passer à une phase plus offensive à la suite des déclarations du ministre français Le Drian, qui estimait que nous nous dirigions vers ce type d'opération dans le but d'une élimination de Daesh?

 

Monsieur le président, je signale que je n'ai pas créé de polémique; je suis dans une démarche constructive!

Réponse de Steven Vandeput

Monsieur Pirlot, depuis le début des opérations russes en Syrie, la Russie a parfois violé l'espace aérien turc. Cette fois, les Turcs ont réagi vivement, peut-être trop!

 

À l'issue de la réunion extraordinaire du Conseil de l'Atlantique – la Belgique y est représentée par un collaborateur du ministre des Affaires étrangères –, convoqué à la demande de la Turquie, le secrétaire général Stoltenberg a demandé à la Turquie et à la Russie de se calmer et a appelé à la désescalade. Il a également appelé les deux pays à intensifier leurs contacts bilatéraux.

 

En ce qui concerne la position de la Belgique, je vous confirme que mon collègue, M. Reynders, et moi-même avons toujours plaidé pour un mécanisme de collaboration qui permettrait d'éviter de tels incidents.

Réplique de Sébastian Pirlot

Monsieur le ministre, je vous remercie. Même si le fait de défendre son espace aérien est légitime, cela ne permet pas à la Turquie de faire n'importe quoi. En outre, le fait d'être membre de l'OTAN exige également la volonté de rechercher des solutions plutôt que de créer des tensions. Je rappelle que mon groupe maintient son soutien à la France, à l'Union européenne, à l'ensemble de la communauté internationale dans la lutte contre Daesh. Nous avons eu l'occasion d'en discuter en commission de la Défense.

 

Il y a une action militaire, car on ne peut négocier avec le ministère des kamikazes, mais il faut aussi une action diplomatique pour ne pas commettre les mêmes erreurs que les Américains en Irak et en Afghanistan. Il faut aussi une action de développement, car on sait très bien que si un jeune n'a pas d'espoir, c'est la porte ouverte au radicalisme.