Question de Frédéric Daerden à Johan Van Overtveldt, ministre des Finances, sur les propos de Charles Michel sur la Grèce

Monsieur le président, monsieur le ministre, "la fin de la récréation a sonné pour la Grèce". Ces mots prononcés par le premier ministre, hier, sont scandaleux. Ils ne sont qu'injures et mépris. Ils doivent nous heurter tous et particulièrement les membres de ce parlement, symbole de la démocratie et de la représentation du peuple. Cette déclaration arrogante est indigne!

 

Votre premier ministre a-t-il voulu évoquer un État, un gouvernement ou un peuple? La réponse importe peu! Ces propos sont tout aussi scandaleux, que ce soit à l'égard d'un État, d'un gouvernement ou d'un peuple. Ces propos sont le symbole du ravage des politiques d'austérité qui ont été imposées et sont encore imposées à la Grèce.

 

Le parti Syriza est arrivé au pouvoir. Il a été plébiscité par le peuple grec car les Grecs ne supportaient plus l'austérité qui leur était imposée. En effet, les pseudo-solutions imaginées dans des cénacles financiers ont détruit et ravagé un pays où le taux de pauvreté a doublé, où le taux de chômage a triplé, où plus d'un million d'emplois ont été perdus avec une hausse des suicides et des dépressions, où on enregistre une diminution de près de 40 % des salaires, où les pensions sont réduites de 45 %, où on enregistre une chute du PIB de 25 %. On pourrait continuer la lecture de cette liste à la violence sans nom!

 

Cette austérité a été et est toujours le résultat d'une politique de la terre brûlée. Si l'austérité est une idéologie pour certains, pour la Grèce, pour le peuple grec, pour le gouvernement grec, pour l'État grec, elle se résume aux chiffres que je viens de vous citer.

 

Monsieur le ministre je souhaite vous poser trois questions très simples.

 

Êtes-vous aussi choqué que nous par les propos tenus par votre chef de gouvernement?

 

Présenterez-vous les excuses du gouvernement à l'égard de l'ensemble du peuple grec et du gouvernement grec? Faut-il déduire de cette déclaration que le gouvernement belge est partisan de la sortie de la Grèce de la zone euro?

Réponse de Johan Van Overtveldt

Lorsque la Grèce a rejoint l’union monétaire il y a dix ans, je pense qu’elle n’a pas clairement perçu les implications de cette adhésion. Ensuite, faute d’un achèvement de l’union monétaire, mais surtout en raison de la politique menée par les gouvernements grecs successifs, le pays a complètement déraillé.


L’Union européenne et le FMI ont témoigné d’une énorme solidarité et ont accordé une aide de 240 milliards d’euros au pays. Cette aide était associée à des conditions qui avaient pour but de relancer l’économie grecque. Nous constatons aujourd’hui que ce programme a échoué.


Cet échec est attribuable aux gouvernements grecs successifs qui n'ont pas appliqué la partie de l'accord qui les concernait. Ils se sont contentés d'économies, sans guère mener de réformes. Le gouvernement grec porte la responsabilité de cette situation. L'ensemble du gouvernement fédéral approuve dès lors l'appel lancé par le premier ministre non pas au peuple, mais au gouvernement grec.


Nous entendons tous être solidaires du peuple grec au sein de l'Eurogroupe des ministres des Finances et du groupe des chefs de gouvernement, mais nous ne voulons pas nous lancer aveuglément dans une solution idéologique ni déverser des tonnes d'argent sans que des solutions ne soient apportées aux problèmes actuels. Chacun doit assumer ses responsabilités. L'Europe et le FMI s'y sont déjà employés et nous demandons à présent que le gouvernement grec suive ces exemples.

Réplique de Frédéric Daerden

Monsieur le ministre, votre réponse est décevante. Vous aussi, vous faites votre donneur de leçons. Pourtant, j'imagine que la tribune publiée dans un grand quotidien britannique économique, à laquelle mon collègue a fait référence précédemment, ne vous a pas échappé. Ces économistes ne vont pas par quatre chemins. Ils rappellent non seulement leur opposition aux politiques d'austérité, démontrent combien elles ont été inefficaces et cruelles et affirment q'une autre politique est nécessaire, une politique basée sur la relance, la croissance et l'emploi. Ils affirment que "la manière dont la Grèce sera traitée sera un message pour tous les partenaires de l'eurozone et ce message doit être un message d'espoir et non de désespoir".

 

Bref, c'est tout le contraire du message de mépris que le premier ministre, avec une forme de paternalisme et sans aucune modestie, a osé adresser hier à la Grèce et qu'aujourd'hui, vous confirmez. Monsieur le ministre, sortez de cette logique punitive! Respectez la démocratie grecque! Respectez les efforts de reconstruction! Plaidez pour un chemin qui honore l'Union européenne!