Question de Stéphane Crusnière à Théo Francken, ministre de la Migration, sur la solidarité européenne en matière de migration

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, mardi, la Commission européenne dévoilait enfin le volet Solidarité de son plan d'action pour les migrants en Méditerranée, un plan qui, jusqu'ici, avait surtout mis en lumière le volet Surveillance et Défense, et qui apparaît aujourd'hui plus équilibré, tout en restant très raisonnable dans le nombre de réfugiés qu'il concerne.

 

Mais vous contestez ce plan, monsieur Francken, parce qu'il prévoit que notre pays accueille 1 364 Syriens et Érythréens échoués sur les rivages grecs ou italiens, ceci en plus de 490 réfugiés séjournant dans des camps dans des zones de guerre sur un total de 20 000. Vous le contestez pour des raisons rien moins que mesquines. Les critères de répartition de l'effort entre les États membres vous attristent. L'assiette du voisin vous paraît plus enviable que celle que l'on vous sert. Vous critiquez vertement les pays en première ligne. Vous jugez que 2 000 personnes par an, c'est trop pour la Belgique, mais vous enragez que l'Italie ne prenne pas les empreintes de 20 000 personnes qui arrivent mensuellement sur son territoire.

 

Michel Rocard disait: "La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde, mais elle doit en prendre sa part." La Belgique aussi! Nous ne vivons plus dans un monde où Athènes et Lampedusa sont des contrées exotiques. Des gens meurent à nos portes. Il faut répondre présents à l'appel qui nous est lancé et auquel nous nous sommes engagés à répondre dans le cadre de l'article 78 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

 

L'urgence n'est pas de savoir si la Pologne ou l'Espagne en font trop ou pas assez; elle est de sauver des vies, sans quoi tous les discours de solidarité européenne ne seraient que du vent. Quel sens resterait-il alors à l'Union dont nous accueillons les plus hautes instances sur notre territoire?

 

Voici mes questions, monsieur le secrétaire d'État.

 

Votre réaction à ce plan vous est-elle propre ou est-ce la réaction du gouvernement dans son ensemble? Quelle position celui-ci compte-t-il défendre en la matière lors du prochain Conseil chargé d'adopter ce plan?

 

Comment comptez-vous mettre en œuvre, dans les meilleurs délais, ce plan d'accueil, et en particulier pour les 1 364 personnes à déplacer entre la Grèce et l'Italie?

 

Allez-vous, dans la foulée, relever le nombre de places tampons disponibles auprès de Fedasil annoncé hier en commission?

 

Enfin, en plus du volet Défense déjà mis en place, qu'en est-il de la stratégie 3D dans ce dossier? Pouvez-vous nous donner les mesures prises en termes de diplomatie et de coopération dans ce cadre?

Réponse de Théo Francken

Monsieur le président, chers collègues, le gouvernement veut davantage de solidarité européenne pour lutter contre la crise en Méditerranée. De plus, nous donnons le bon exemple. Nous sommes solidaires avec le sauvetage des  réfugiés en bateau. Sauver des vies humaines est pour nous prioritaire. Ainsi, le Godetia est-il actuellement en opération en Méditerranée.

 

Par ailleurs, nous sommes également solidaires avec les nombreux efforts que fournit la Belgique en matière d'accueil. En 2015, nous allons réinstaller pas moins de 550 réfugiés. En effet, l'objectif est passé de 150, qui était le nombre prévu par le gouvernement précédent, à 550 sous le gouvernement actuel. Ceci vient s'ajouter aux demandes d'asile que mes services traitent tous les jours. Depuis le début du conflit, nous avons accordé le statut de protection internationale à quelque 5 000 Syriens. Nous reconnaissons chaque année des milliers de réfugiés. Notre gouvernement fournit des efforts bien au-dessus de la moyenne européenne.

 

Le fait que la Commission dépose un projet concret sur la table devant permettre de mieux organiser la solidarité entre les États membres est positif. Nous voulons, comme tant d'autres États membres, discuter à propos de la clef de répartition exacte. Ainsi devrait-il être tenu compte des nombreux efforts faits par notre pays ces dernières années en matière d'accueil des demandeurs d'asile. À cet égard, dans les prochaines semaines, les contacts nécessaires seront établis de manière formelle et informelle aussi bien par le premier ministre que par moi-même en prévision du sommet européen de fin juin.

 

Un autre point essentiel est le principe de réciprocité. Nous sommes d'accord avec la relocation de réfugiés, à condition que l'Italie et la Grèce appliquent correctement les directives européennes en matière d'asile et du Règlement de Dublin. L'identification de demandeurs d'asile à l'arrivée doit se dérouler aussi bien intégralement que correctement.

Réplique de Stéphane Crusnière

Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie pour vos réponses. Nous ne pouvons rester insensibles à ce qui se passe en Méditerranée. Je l'ai déjà dit, les plans de sauvetage et les plans d'accueil ne seront pas suffisants. Il importe également de traiter le problème à la source et de travailler aux causes de ces départs. Cela doit se faire avec notre diplomatie, notre coopération, avec la coopération européenne, avec la diplomatie européenne.

 

J'entends bien les règles que vous souhaitez voir mises en application au niveau de l'Italie, mais monsieur le secrétaire d'État, n'oubliez pas une chose: derrière les chiffres, derrière ces quotas, il y a surtout des êtres humains! Faites donc un peu preuve d'humanité!

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