Déclaration gouvernementale: intervention de Gwenaëlle Grovonius sur le chapitre "Relations internationales"

Monsieur le président,

monsieur le ministre,

 

je suis inquiète parce que la vision de ce gouvernement en ce qui concerne les relations internationales fait peur. Elle fait peur parce qu'elle semble vouloir se focaliser sur des actions guerrières et le business. Je crains, dès lors, que notre pays devienne, dans les prochains mois, les prochaines années, un acteur atlantiste aveugle, au nom de l'intérêt du marché et des actions qui rapportent à court terme.

 

Je crains que l'humanitaire, la solidarité internationale et l'aide aux populations soient passés sous silence. En effet, comment expliquer les restrictions budgétaires en matière de coopération au développement quand, dans le même temps, des budgets de plusieurs milliards sont prévus pour la Défense sans plan stratégique. Pourtant, on n'obtient pas la paix et on n'assure pas la défense des droits de l'homme dans le monde en envoyant des bombes. Des solutions plus globales sur le plan diplomatique, humanitaire, des droits et du développement socio-économique sont nécessaires. Or, c'est tout le contraire qui nous est proposé. Je vous présente quelques extraits du menu. Il y a, tout d'abord, l'instrumentalisation de la politique de coopération qui doit servir à régler les problèmes d'immigration, sécuritaires et, surtout, à générer de nouveaux marchés pour les entreprises privées. L'accord insiste, notamment, sur le fait que la coopération doit permettre l'amélioration du climat d'investissement qui constitue une valeur ajoutée pour les entreprises, les experts et les universités belges.

 

Pour le PS, il est essentiel que les investissements privés soient mis au service du développement et non l'inverse, notamment, en privilégiant le soutien au secteur privé local.

 

Par ailleurs, dans votre accord de gouvernement, on ne trouve pas une ligne, par exemple, sur la lutte contre la faim dans le monde ou encore contre la spéculation ou l'accaparement des terres, la question des luttes contre les inégalités, la question de l'annulation des dettes ou des fonds vautours. Tous ces aspects sont passés sous silence.

 

Rien non plus sur les droits sexuels et reproductifs dans le cadre des objectifs du Millénaire post-2015. Et ce, malgré la résolution adoptée par notre parlement. J'ai donc le sentiment d'avoir une coopération au développement au rabais.

 

C'est ce que me laisse penser également votre fausse promesse d'atteindre l'objectif de 0,7 % du revenu national brut. En effet, comment y croire quand vous indiquez d'emblée que cela dépendra des possibilités budgétaires. Comment y croire quand le programme de votre parti, monsieur De Croo, remet en doute cette norme.

 

Dans ces conditions, pouvez-vous m'indiquer de manière détaillée ce que ce cadre budgétaire nécessitera comme économies? Quel sera l'impact de ces économies sur la coopération au développement?

 

En ce qui concerne la question du financement, je tiens à rappeler que ce parlement a adopté sous la précédente législature, à l'initiative du PS, une résolution sur les sources innovantes de financement de la coopération au développement, dont la taxe sur les transactions financières. Là, une nouvelle fois, pas une ligne sur cette question n'est à trouver dans l'accord, alors que le programme du MR en parlait pourtant.

 

Je relève encore la volonté de concentrer, de manière sectorielle, thématique et géographique, la coopération au développement: moins de pays et moins d'organisations partenaires. Mais rien n'est dit sur les choix politiques qui seront opérés. Nous pouvons donc vivement craindre que ces choix ne soient pas neutres.

Quelle liberté d'action réelle existera-t-il encore pour les ONG?

Quels sont les pays que vous rayerez de cette liste?

Dans quelles organisations internationales concentrerez-vous l'aide?

 

Les références à l'efficience, l'efficacité et la cohérence de l'aide sont importantes. En la matière, la loi sur la coopération au développement, initiée par les ministres Magnette et Labille, constitue un excellent cadre de travail.

 

Encore faut-il savoir comment ce gouvernement compte les traduire dans les faits et compte les évaluer. Or, à ce stade, rien n'apparaît non plus sur ce point dans l'accord.

 

Je suis impatiente de vous entendre sur tous ces éléments.

 

En effet, il ne suffit pas d'écrire que l'on veut promouvoir et défendre la protection des droits de l'homme, le respect de l'intégrité physique de chacun et de chacune, la défense des droits spécifiques des femmes, des enfants et des personnes vulnérables, le respect du droit international du travail, la lutte contre l'impunité en cas de grave violation du droit international humanitaire. Il ne suffit pas de slogans, il faut des actes.

 

Or, pour l'instant, en ratifiant l'accord Union européenne/Colombie/Pérou, en ne disant pas un mot sur la Palestine dans cet accord de gouvernement, et bien, monsieur le ministre, c'est tout le contraire que vous nous promettez. Et cela, monsieur le ministre, mon groupe ne peut l'accepter.

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