Question de Christiane Vienne à Elio Di Rupo, Premier ministre, sur la situation en Ukraine

Depuis la volteface de Viktor Ianoukovitch lors du Sommet de Vilnius en novembre dernier, la situation en Ukraine n’en finit plus de se dégrader… Et aucun des deux camps ne semble vouloir plier.

 

Au lendemain d'affrontements qui ont fait au moins 26 morts, une crise qui était au départ d’apparence politique – « pour ou contre l’Europe » – s’est muée en crise de régime et surtout en bain de sang.

 

Un bain de sang et des violences inacceptables qui, s’ils ne trouvent aucune justification, nous prouvent que la situation qui prévaut dans ce pays membre du Conseil de l’Europe n’est pas aussi claire que ce que certains prétendent.

 

Une seule chose est sûre cependant : rien ni personne ne peut brimer indéfiniment les aspirations profondes d’un peuple, d’une génération. Ces aspirations sont certes européennes mais elles sont aussi celle d’une volonté d’ « autre chose » face à la corruption, aux dérives autoritaires ou aux lois liberticides.

 

Une réponse adaptée, dans la nuance, et en soutien aux mouvements démocratiques et pacifiques et contre la répression brutale des autorités s’impose donc dans l’action indispensable de l’UE.

 

Monsieur le Premier Ministre,

 

1. Pouvez-vous, via nos relais diplomatiques, nous dresser un état des lieux de la situation actuelle en Ukraine ?

 

2. Aujourd’hui à 14h se tient un Conseil européen des Ministres des Affaires étrangères pour débattre de cette situation et des réponses que l’UE peut y apporter notamment en termes de sanctions. Quelle sera la position défendue par la Belgique dans ce cadre ? Comment s’assurer que ces sanctions ne pénalisent pas la population ukrainienne et n’enveniment pas la situation ? Comment l’UE doit-elle selon vous réagir et adopter une position globale ?

 

3. Enfin, vis-à-vis de la Russie, comment notre pays et l’UE se positionnent-ils notamment lorsque la Russie affirme que « les européens ont suffisamment fait les médiateurs » ?

Réponse d'Elio Di Rupo, Premier ministre

Nous sommes les témoins de violences inacceptables aux portes de l’Union européenne.

 

La situation se dégrade d’heure en heure. On parle de violations des droits de l’homme, de disparus, de torture. Il y a des morts et des blessés.

 

Tout doit être fait pour éviter un conflit généralisé. La Belgique condamne toute violence.

 

Le gouvernement condamne fermement la violence abusive et outrancière des autorités. La Belgique indiquera clairement que pareils crimes ne peuvent pas rester impunis.

 

La seule solution à cette crise passe par le dialogue politique dans le respect de la démocratie, des libertés individuelles et des droits de l’homme.

 

Faire passer ce message en termes crédibles est le nouveau défi que devront relever la communauté internationale et la diplomatie européenne; la réunion extraordinaire, cet après-midi, du Conseil des Affaires étrangères constitue une démarche importante dans ce domaine. Le 13 février dernier, la Chambre a du reste adopté une résolution sur l’Ukraine dont les termes soulignent également le rôle de premier plan de la diplomatie européenne.

 

À cette réunion, le ministre des Affaires étrangères s'inspirera de la résolution de notre assemblée.

 

Plusieurs pistes seront évoquées, comme un embargo sur les armes et équipements utilisés pour la répression ou des mesures ciblées – gel des avoirs financiers et refus de visa pour l'UE – à l'égard des responsables de violences.

 

Nous pouvons également prendre des initiatives telles que l'envoi d'observateurs internationaux par le biais du Conseil de l'Europe et de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

 

Je pense aussi à des enquêtes indépendantes sur les cas de disparition, de torture et de meurtre, ainsi qu'à une assistance humanitaire.

 

Ayant participé au sommet de Vilnius, je répète que nous sommes déterminés à signer un accord de coopération avec l'Ukraine. Nous l'avons indiqué au président Ianoukovitch.

 

Nous n'avons jamais payé pour qu'un pays se rapproche de nous. Nous continuerons à tendre la main aux Ukrainiens qui aspirent à la démocratie.

 

La diplomatie européenne doit prendre contact avec tous ceux qui peuvent éviter l'escalade de la violence. L'Europe compte favoriser les réformes en Ukraine et signer un accord d'association avec ce pays.

(NB: Seul le texte prononcé fait foi.)

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