Question de Gwenaëlle Grovonius à Didier Reynders, ministre des Affaires étrangères, sur la protection du Dr Mukwege en RDC

Monsieur le président, monsieur le ministre, la situation en RDC reste plus qu'inquiétante non seulement sur le plan politique, comme en témoigne la constitution du nouveau gouvernement, mais aussi sur celui de la sécurité. Ce sont tout particulièrement les défenseurs des droits humains qui en paient le plus lourd tribut: ceux qui aident les civils face à l'enlisement politique et au conflit armé qui perdure dans ce pays.

 

Dans ce contexte, le docteur Mukwege, prix Sakharov 2014 - cet homme qui répare les femmes et qui combat le viol comme arme de guerre - est une figure emblématique de cette lutte en faveur des droits humains et contre la barbarie qui menace la vie de nombreuses femmes, de ses patientes, mais également sa vie et celle de ses confrères. Ce danger pèse en permanence, en particulier dans la région du Kivu.

 

Nous apprenons aujourd'hui que les casques bleus de l'ONU n'assureraient plus la protection permanente du médecin. Il s'agit d'une décision unilatérale et incompréhensible qui nécessite une réaction énergique. Je rappelle que la Belgique est toujours active au sein de la MONUSCO.

 

Monsieur le ministre, je souhaiterais vous poser trois questions. Disposez-vous d'informations complémentaires à ce sujet? La Belgique va-t-elle intervenir pour protéger ces vies qui sont, aujourd'hui, en danger? Si oui, comment? Au travers de notre position au sein de la MONUSCO, une intervention politique est-elle envisageable?

Réponse de Didier Reynders

Monsieur le président, chères collègues, je connais particulièrement bien la situation du Dr Mukwege. Je l'ai reçu à de nombreuses reprises et je lui ai rendu visite à l'hôpital Panzi.

 

Je voudrais quand même rappeler que c'est entre autres à l'initiative de la Belgique que des mesures ont été prises pour assurer sa protection, puisqu'il a déjà fait l'objet d'une attaque près de l'hôpital. Je suis intervenu personnellement pour que la MONUSCO mette en place ces mesures de protection autour de l'hôpital, autour de sa résidence et dans tous ses déplacements, notamment vers l'aéroport ou vers d'autres lieux de la ville. Nous sommes bien au courant de la situation. Mes services ont des contacts fréquents avec le Dr Mukwege.

 

Vous m'interrogez sur la situation actuelle. La MONUSCO dément vouloir retirer la protection au Dr Mukwege. La protection de l'hôpital Panzi, de la résidence du docteur et la protection de sa personne est assurée par plusieurs équipes d'agents de sécurité privée, comme cela a été convenu avec lui, qui travaillent en étroite collaboration avec la MONUSCO. La sécurité de tout déplacement hors de l'hôpital est assurée par des escortes de police de la MONUSCO.

 

Cela étant, je reste convaincu que le mandat de la MONUSCO permet de faire plus, d'aller plus loin. Nous n'avons pas attendu ces nouvelles pour agir. Les services, que ce soit à New York, au Conseil de sécurité, ou à Kinshasa, ont déjà pris les initiatives de sorte que l'on vérifie bien que cette protection reste assurée au Dr Mukwege et, s'il le faut, qu'elle soit renforcée. Nous allons continuer à travailler en ce sens.

 

Je compte d'ailleurs, dans la foulée des démarches actuellement entreprises, demander à nos représentants au Conseil de sécurité de, lors d'un débat ouvert prévu le 15 mai sur les conflits, et notamment sur la situation des femmes dans les conflits, à ce qu'ils rendent hommage au travail du docteur et plaident pour qu'il bénéficie de la protection maximale.

 

Je voudrais conclure en vous disant que nous sommes évidemment à la disposition du Dr Mukwege s'il avait besoin d'aide. Lorsqu'il a fait l'objet de violences et qu'un de ses proches a été abattu, il y a déjà quelque temps, nous l'avions fait sortir du pays via notre ambassade à Bujumbura. Soyez assurées que nous faisons tout, comme nous l'avons fait pour obtenir cette protection, pour qu'elle soit maintenue.

Réplique de Gwenaëlle Grovonius

Monsieur le président, monsieur le ministre, je vous remercie pour ces éléments de réponse. Le moins que l'on puisse dire, c'est que visiblement le flou persiste. J'ai entendu les éléments que vous nous avez communiqués. J'espère qu'ils sont avérés.

 

Je ne doute pas, et vous le demande avec force, que vous prendrez tous les contacts utiles pour vous assurer que les informations communiquées aujourd'hui sont bien fausses et que la sécurité du docteur, de ses proches et de ses patientes est bel et bien assurée. J'ai bien entendu que c'est l'objectif que vous souhaitez défendre. Sachez que c'est aussi celui de mon groupe. Nous vous soutiendrons dans cette démarche.