Question de Julie Fernandez-Fernandez à Charles Michel, Premier ministre, sur le sondage insidieux posté en ligne par T. Francken

Monsieur le premier ministre, tourner sept fois son pouce avant de tweeter est inutile, tout comme vos recommandations au secrétaire d'État à l'Asile et à la migration, tout comme l'indignation des ONG, des membres de la justice et des démocrates de ce pays.

 

Après la diffusion le présentant en chasseur d'Africains, après ses tweets sur les conditions d'accueil au parc Maximilien et au WTC, après ses commentaires sur le gouvernement des juges, qui attaquaient frontalement le pouvoir judiciaire, après ses déclarations scandaleuses à propos de Médecins Sans Frontières et d'Amnesty International, M. Francken s'essaye aujourd'hui aux sondages nauséabonds.

 

Au Moyen-Orient, qui faut-il sauver en priorité? Voilà la question que pose en substance M. Francken aux personnes qui suivent sa page Facebook. Comme si l'application du droit international était tout d'un coup suspendue à un plébiscite. Comme s'il y avait une hiérarchie à établir entre les bons et les mauvais réfugiés, suivant leurs convictions idéologiques. Comme si les armes chimiques d'un régime odieux demandaient le nom d'un dieu avant de s'abattre sur des enfants, des femmes ou des hommes. Finalement, comme si certaines vies valaient plus que d'autres.

 

Monsieur le premier ministre, couvrez-vous encore une fois les manœuvres de votre secrétaire d'État? Pensez-vous, comme il le suggère, qu'une hiérarchie doit être établie entre les candidats réfugiés selon leurs convictions philosophiques? Sinon, allez-vous enfin prendre des sanctions à son égard, pour mettre un terme définitif à ses sorties qui abîment l'image et le vivre-ensemble de notre pays, sur notre territoire?

 

Car ces messages ne viennent pas de n'importe qui. Je rappelle que, dès l'entame de cette législature, M. Francken rendait hommage à cette idéologie du rejet de l'autre par sa présence à l'hommage rendu à un collaborateur nazi.

 

Avant les vacances, je taxais votre attitude de silence complice. J'espère qu'aujourd'hui, c'est la voix d'un attachement profond aux valeurs démocratiques que je vais entendre. J'espère que le sens de la solidarité pèse encore dans ce pays. Qu'une vie vaut une vie, qu'elle soit en Belgique ou au Moyen-Orient. Que vous condamnez, aujourd'hui, devant cette assemblée, monsieur le premier ministre, l'inacceptable.

Réponse de Charles Michel

Monsieur le président, chers collègues, je voudrais mettre les points sur les I. À aucun moment, en aucun cas, d'une quelconque manière, il ne s'agit d'exprimer une discrimination ou une stigmatisation. Au contraire, nous devons prendre en compte, comme le parlement européen et la Chambre l'ont souhaité, des résolutions qui appellent à ce qu'un gouvernement assume pleinement ses responsabilités pour protéger, comme nous le faisons, les personnes les plus vulnérables - y compris les minorités religieuses au Moyen-Orient. C'est le sens de l'action qui est menée par ce gouvernement.

 

Chaque fois, j'entends des propos qui interpellent, mettent en cause, interprètent, modifient certains messages. Lorsqu'il y a des choses à dire, comme cela été le cas à l'occasion de déclarations visant Médecins Sans Frontières, je l'ai fait sans la moindre ambiguïté. En l'occurrence, je voudrais réaffirmer que ce gouvernement assume pleinement ses obligations internationales et morales.

 

Je voudrais réaffirmer qu'en matière d'asile et de migration, nous avons considéré qu'il fallait mener une politique à la fois ferme mais humaine, comme nous le faisons, de façon à assumer les responsabilités quand il faut le faire.

 

Enfin, les faits comptent bien plus que certains discours qui tentent de travestir la réalité. Ce gouvernement a octroyé cinq fois plus de visas humanitaires que la précédente législature.

Réplique de Julie Fernandez-Fernandez

Monsieur le premier ministre, depuis plusieurs semaines, nous assistons ici à votre strip-tease. Chaque semaine, vous vous déshabillez un peu plus pour sauver vos partenaires, pour sauver M. Francken. On peut vivre avec.

 

Ce qui m'embête un peu plus, en tant que parlementaire, c'est que vous déshabilliez la démocratie. Vous venez d'intervenir pendant deux minutes et à aucun moment, ni dans une virgule, ni dans un silence, vous n'avez condamné le sondage nauséabond de M. Francken. Vous me faites honte!

 

Ce pays, dans les années 60, a accueilli mes parents comme réfugiés politiques. Visiblement, le premier ministre de l'époque avait un autre costume.