Question de Fabienne Winckel à Kris Peeters, ministre de l'Emploi, sur le pouvoir d'achat des travailleurs

Monsieur le président, monsieur le ministre, nous avons entendu, ces dernières semaines et tout à l'heure, la majorité pousser des cocoricos. En effet, en Belgique, tout semble aller parfaitement. L'emploi se porte bien, le pouvoir d'achat des Belges est intact voire même parfois amélioré, les miracles annoncés arrivent grâce aux grandes réformes de flexibilité du travail à outrance!

 

Plus sérieusement, j'avais envie de vous parler calmement et avec beaucoup d'humilité d'une étude réalisée par Solidaris qui révèle que 40 % des travailleurs peinent à boucler leurs fins de mois. Ils ne peuvent pas mettre un cent de côté. Le travail ne permet plus de faire réellement des projets de vie. Pire, pour beaucoup, il ne suffit même plus à vivre!

 

Nous savions déjà que 15 % de notre population courait un risque de pauvreté: les pensionnés, les chômeurs et les familles monoparentales. Maintenant, ce sont les travailleurs qui s'appauvrissent! Aujourd'hui encore, une enquête de Solidaris, menée auprès de plus de 800 travailleurs, met en lumière les difficultés rencontrées par nombre d'entre eux qui ont des difficultés à joindre les deux bouts.

 

Parmi les travailleurs interrogés, 29 % disent arriver tout juste à boucler leur mois; 8 % disent vivre avec un compte à découvert; 3 % assurent qu'ils ne s'en sortent plus et craignent de basculer dans la pauvreté. Ces chiffres sont inquiétants. Et ce ne sont évidemment pas les mesures prises par votre gouvernement qui vont améliorer les choses. Au contraire, ces mesures ne font que continuer à appauvrir nos citoyens, notamment les travailleurs. Je pense au saut d'index, à la hausse du coût de la visite chez certains spécialistes, à l'augmentation de la TVA sur l'électricité, à l'augmentation des accises sur le diesel, etc. Maintenant, vous voulez vous attaquer plus durement au salaire des travailleurs en modifiant la loi de 1996 qui permet aux partenaires sociaux de négocier les augmentations salariales.

Monsieur le ministre, votre gouvernement est à la recherche de 2,8 milliards. Nos craintes sont grandes que la facture s'adresse à nouveau aux travailleurs et aux personnes plus fragiles. N'est-il pas temps pour vous de prendre un engagement clair en arrêtant de vous attaquer aux plus faibles de notre société et en arrêtant de toucher au pouvoir d'achat de nos citoyens? Quand votre gouvernement va-t-il enfin changer de cap? Quand allez-vous enfin faire contribuer les plus nantis et arrêter de vous en prendre aux travailleurs?

Réponse de Kris Peeters

Monsieur le président, madame Winckel, j'ai bien noté tous les chiffres que vous avez mentionnés. Je conviens avec vous que la pauvreté est un problème très grave auquel il faut s'attaquer. Toutefois, il y a d'autres chiffres. Le gouvernement a tenté, dans des circonstances économiques difficiles, de préserver le pouvoir d'achat des travailleurs. Je tiens ici à votre disposition deux études du Bureau du Plan. Ses prévisions de septembre 2016 montrent que le pouvoir d'achat augmente chaque année: + 0,5 % en 2014, + 1,3 % en 2015, + 1 % en 2016, + 1,1 % en 2017. L'influence du tax shift sur l'augmentation du pouvoir d'achat est claire et nette. Selon l'analyse d'impact de fin 2015, le tax shift augmente le pouvoir d'achat de 0,81 % en 2015, de 0,68 % en 2016 et jusqu'à 2,25 % en 2017.

 

Madame Winckel, la pauvreté est un très grave problème. Les chiffres que nous avons sont différents des vôtres mais je suis d'accord d'étudier les chiffres repris dans l'étude que vous avez évoquée pour trouver des solutions. Ce n'est pas le moment d'exposer ici toutes les décisions prises dans le cadre du budget 2017 mais je suis convaincu que nous pourrons en discuter une fois que le gouvernement aura pris sa décision.

Réplique de Fabienne Winckel

Monsieur le ministre, votre réponse est révélatrice d'une guerre des chiffres. C'est regrettable d'en arriver là. Nous sentons bien que, dans la population, cela ne va pas! Sortez de vos bureaux, allez voir les gens! Il y a des difficultés. Ce sont des chiffres, ce sont des rapports. Allez à la rencontre des gens!

 

Examinez les mesures totalement injustes que vous avez prises en deux ans. Vous avez accepté le saut d'index, une flexibilité du travail à outrance, de casser la concertation sociale, des mesures diminuant directement le pouvoir d'achat des gens et maintenant vous citez des rapports … Pour quelle raison? Pour vous excuser de ces mesures qui sont totalement abjectes? Réveillez-vous monsieur Peeters!

 

Quand vous dites vouloir prendre des mesures justes et équitables, nous pouvons vous suivre. Mais vraiment, il est temps de se réveiller et de sentir le pouls de la population. C'est quand même triste de penser que plus de 850 000 femmes vivent sous le seuil de pauvreté. Il est temps de bouger à ce sujet, de travailler sur le temps partiel. Mais je n'ai rien entendu de votre part, si ce n'est une énumération de chiffres.