Question de Laurette Onkelinx à Jan Jambon, ministre de l'Intérieur, sur l'agression de 2 policiers à Schaerbeek

Monsieur le président, monsieur le ministre, hier, à Schaerbeek, deux policiers ont été attaqués au couteau par un homme isolé, qu'il leur a fallu neutraliser d'une balle dans la jambe pour éviter qu'il ne fasse un plus grand nombre de victimes. Cet événement vient s'inscrire dans la ligne d'agressions du même ordre à Charleroi, pendant l'été, et à Uccle, il n'y a pas si longtemps. C'est révélateur d'un nombre d'agressions extrêmement important vis-à-vis de nos policiers. Mes premières pensées vont d'abord et avant tout aux victimes de ces agressions. Je salue le courage des policiers qui se sont fait agresser hier.

 

En ce qui concerne l'auteur des agressions d'hier, on dit que c'est une personne radicalisée depuis 2009 au moins et qu'elle était éventuellement sur la liste de l'Ocam. Or, ce matin, le bourgmestre de Schaerbeek nous disait qu'il n'avait reçu aucune information de quelque nature que soit révélant la radicalisation de cette personne.

 

Je me fais l'interprète du bourgmestre qui pointe la responsabilité des gouvernements successifs et de ce gouvernement en particulier. Il dit que depuis quinze ans, la population bruxelloise a augmenté de 25 %, or il n'y a pas eu d'augmentation du nombre de policiers. Autrement dit, le nombre de policiers par habitant a diminué. Cela vaut pour Bruxelles mais cela vaut également pour certaines villes en Flandre et en Wallonie qui connaissent la même difficulté vis-à-vis du terrorisme.

 

Mes questions sont très simples. Oui ou non, cette personne était-elle radicalisée et figurait-elle sur la liste de l'Ocam? Comment expliquer que la commune de Schaerbeek n'en ait pas été informée? Enfin, comment agir pour aider les communes particulièrement confrontées aux phénomènes de radicalisation et de menace terroriste?

Réponse de Jan Jambon

Au nom de la Chambre, je voudrais commencer par rendre hommage aux victimes, mais également à l'ensemble du corps de police qui se dévoue quotidiennement pour assurer notre sécurité.

 

Ceci étant dit, des questions pertinentes ont été posées et elles méritent une réponse. Cette personne était-elle connue des services? Le 19 septembre dernier, la Sûreté de l'État a distribué des informations classifiées à différents services: l'Ocam, le service d'information de la Défense, le parquet fédéral. Ces informations classifiées concernaient cet homme, dès lors je ne peux pas vous les communiquer. Mais les services ont estimé à ce moment-là qu'il ne constituait pas un danger direct, ni pour les institutions ni pour les personnes physiques.

 

Dès que nous saurons pourquoi l’information n’est pas parvenue jusqu’au niveau local, j’en aviserai immédiatement le Parlement. La nouvelle banque de données dynamique, gérée par la police fédérale, permet à tous les services d’ajouter et de consulter des informations. Elle présente encore selon moi la lacune de ne pas permettre aux bourgmestres d’accéder aux informations qu’elle contient. Pour y remédier, nous devrons leur délivrer une habilitation de sécurité.

 

En ce qui concerne la prévision des moyens, il s'agit d'une responsabilité mutuelle, sur le plan local et sur le plan fédéral. Spécifiquement pour Bruxelles, nous avons mis en place le plan Canal. Mme la bourgmestre Schepmans y a fait allusion, nous avons réalisé l'évaluation de la phase 1. Les problèmes sont-ils résolus? Pas du tout! Y a-t-il des résultats sur le terrain? Plus que nous ne l'avions estimé! Les résultats sont énormes et nous allons continuer le travail. La phase 1 a été évaluée et nous allons maintenant élargir le plan aux six autres communes.

 

Depuis le 1er octobre, les effectifs prévus sont sur le terrain. Nous sommes en train d'augmenter les réserves de 180 personnes spécifiquement pour Bruxelles. Nous prévoyons également 185 personnes à la police judiciaire pour cette zone du canal. Au total, cela fait presque 500 personnes supplémentaires pour la sécurité à Bruxelles. J'espère que le niveau local suivra dans la même proportion.

Nous ne sommes pas confrontés à une situation d'urgence. Dans un État de droit tel que le nôtre, la réclusion n'est possible qu'à la suite d'une condamnation. L'inverse ne se produit qu'en dehors de l'État de droit.

Réplique de Laurette Onkelinx

Monsieur le ministre, je vous remercie. Par rapport aux questions que je vous ai posées, vous dites: un, oui, la personne était connue de nos services et il y avait des informations classifiées. Deux, selon ces informations classifiées, la personne était peut-être radicalisée, mais, selon les services d'analyse, pas dangereuse. Comme on le sait, certains protagonistes des attentats de Paris ou des attentats de Zaventem et de Maelbeek étaient considérées de la même manière. Il y a une première question concernant l'évaluation de la menace d'individus radicalisés.

 

La deuxième question qu'on peut se poser, c'est qu'il n'y a aucune information envers les autorités locales. Or, les autorités locales travaillent sur la sécurité, mais principalement sur la prévention. Elles doivent être averties en amont pour pouvoir, justement, faire un travail autour des noyaux de radicalisme pour éviter des faits comme ceux que l'on a connus. Donc, là, il y a eu un problème. Nous allons poursuivre avec vous et avec le ministre de la Justice, en commission Attentats, cette question particulière du non-travail avec les autorités locales.

 

Enfin, c'est vrai que vous avez investi dans le plan Canal. Personne ne va à l'encontre de ce constat. Pour une commune comme Schaerbeek, qui compte quand même 131 000 habitants, vous savez que le plan Canal, c'est zéro policier en plus dans la première phase et 25 dans la deuxième, pour le moment. Et donc, ce que disent les autorités locales, c'est qu'avec cela, alors qu'on a de plus en plus de difficultés et une croissance de la population très importante, il y a moins de policiers par habitant. Cela pose un problème crucial.

 

J'en reviens à ce que disaient mes collègues. Il faut bien plus cibler les mesures. En commission Attentats terroristes, les services, les uns après les autres, nous disent qu'il faut des moyens supplémentaires. Et puis il faut travailler ensemble et faire confiance aux communes. Manifestement, nous sommes encore loin du compte.