Question d'Ahmed Laaouej à Johan Van Overtveldt, ministre des Finances, sur les Bahamas Leaks

Monsieur le ministre, de nouvelles révélations dévoilent l'existence de 175 000 sociétés offshore aux Bahamas. Excusez du peu! Vous vous rappellerez qu'il y a quelques mois, au moment de la divulgation des Panama Papers, je vous avais déjà annoncé en commission des Finances que d'autres scandales éclateraient. En voilà un nouveau. Après Offshore Leaks, LuxLeaks, SwissLeaks et les Panama Papers, voici les Bahamas Leaks. Quand cela va-t-il s'arrêter? On pourrait se poser la question et on pourrait même commencer à se lasser. Cela étant, ne comptez pas sur nous pour être blasés!

 

Nous ne pouvons que répéter, monsieur le ministre, notre indignation devant cette injustice flagrante qui voit certains éluder l'impôt pendant que les travailleurs, eux, le paient. Cette situation, vous le comprendrez, est insupportable.

 

À nouveau, la filiale d'une banque belge aidée par notre État est citée dans ce scandale. C'est pourtant à coups de milliards qu'il a fallu sortir les banques du gouffre de la crise financière en 2008. Dès lors, apprendre que ces mêmes banques, du moins certaines d'entre elles, ont pu poursuivre ces pratiques est tout aussi inadmissible. D'autant que le secteur bancaire et assurantiel recourt à des licenciements par centaines, si ce n'est par milliers. Voilà donc qui ajoute à l'injustice une couche supplémentaire d'indécence.

 

Puisque je parle d'indécence, Neelie Kroes, ex-commissaire européenne à la Concurrence, semble avoir disposé d'une offshore aux Bahamas. Monsieur le ministre, après Barroso qui rejoint Goldman Sachs, voilà qu'on découvre les prises d'intérêt d'une ex-commissaire européenne dans un paradis fiscal. On comprend mieux pourquoi la Commission a fait preuve de tant d'inertie dans la lutte contre la fraude fiscale internationale.

 

Monsieur le ministre, voici quelques questions. Quel est l'état du dossier "lutte contre les paradis fiscaux" à l'échelle européenne? Combien de dossiers concernent-ils des Belges? L'Inspection spéciale des impôts a-t-elle déjà reçu ces dossiers et a-t-elle déjà diligenté une enquête? Allez-vous renforcer votre politique de lutte contre la fraude fiscale internationale? Ne serait-il pas temps d'agir également sur le plan national en retirant leur agrément aux banques, à leurs filiales et aux intermédiaires fiscaux qui versent dans cette forme de criminalité financière?

 

Bref, monsieur le ministre, qu'entreprenez-vous pour avancer enfin sur le terrain de la lutte contre la criminalité financière?

Réponse de Johan Van Overtveldt

Des informations relatives à des constructions juridiques mises en place dans des paradis fiscaux refont surface. Il faut obtenir des informations supplémentaires pour avoir une vue complète de la situation. Au moment des révélations concernant les Panama Papers, j'ai immédiatement insisté auprès des organes de presse pour qu'ils me fournissent davantage d'informations, mais ils ont refusé. Je réitérerai ma requête.

 

L'ISI a enregistré la liste qui a été diffusée et s'efforce à présent d'obtenir plus d'informations.

Nous étudions par ailleurs quelle est notre marge de manœuvre dans le cadre de l'Accord sur l'échange de renseignements en matière fiscalesigné avec les Bahamas en 2014.

 

La presse a évoqué 732 Belges ou résidents en Belgique impliqués dans les Panama Papers. L'ISI a ouvert 231 dossiers au nom de personnes physiques et 8 de personnes morales. L'envoi d'une demande d'information les exclut d'une régularisation fiscale éventuelle. Ces dossiers sont à l'examen dans le cadre duquel la concertation una via s'applique.

 

Je m'étonne de ces informations car le CEO de Dexia a déjà mentionné dans le détail, le 7 juin en commission de la Chambre, l'existence aux Bahamas d'une filière Dexia dont les neuf sociétés ont été vendues en 2010 et en 2011.

 

Le gouvernement n'a pas attendu les Panama Papers, et certainement pas les Bahamas Leaks,

pour s'attaquer à l'évasion fiscale. Songeons à la taxe Caïman, à l'échange européen de rulings

et aux dix mesures de lutte contre la fraude fiscale et l'évasion fiscale à grande échelle. Le gouvernement ne tolèrera jamais l'évasion fiscale flagrante et à grande échelle par le biais de montages.

Réplique d'Ahmed Laaouej

Monsieur le ministre, il vous faut comprendre une chose très simple. Quand les travailleurs, les ménages apprennent par la presse, mois après mois, de nouveaux scandales financiers où des gens fraudent pour des milliards d'euros, alors qu'eux paient leurs impôts et subissent toutes les mesures de votre gouvernement, ceux-ci en ont tout simplement marre!

 

 

Si, très rapidement, votre gouvernement ne montre pas plus de volonté dans la lutte contre la criminalité financière, nos concitoyens auront raison de vous dire qu'il y a, dans notre pays, deux poids, deux mesures, que vous êtes dur avec eux et que vous êtes faible avec les gros poissons. Monsieur le ministre, la balle est dans votre camp!